La bibliothèque de Déols dans L’Indre organise régulièrement un café-lecture.  Celui sur les albums a attiré moins de monde blogbmque d’habitude mais la douzaine de participantes (Les albums feraient-ils peur aux  hommes ?) ont été emballées et ont emprunté  les albums dans la foulée.

C’est décidé : nous le ferons désormais à chaque printemps.

Depuis quelques mois, nous avons aussi mis un bac à albums pour les « grand-large », stratégiquement placé entre enfants et adultes, et, grâce aussi  aux diverses présentations qu’on assure, ils vivent mieux !

Véronique Lottaz, bibliothécaire

Des échos reçus récemment, trois illustrent bien ce qui fait le fondement d’1, 2, 3 albums à savoir la transmission des histoires : lire pour soi et lire pour les autres. Et pas toujours dans le sens qu’on croit. Se rappeler des témoignages de l’an passé où des patients lisaient aux soignants, et des lycéens à leurs professeurs.

Passation entre pairs
Campus des métiers à Bobigny (93). Les cordonniers ont fait, dans leur atelier, bobigny atelierune lecture collective du Casque d’Opapi à des Bacs pro carrossiers, en présence de leur professeur de pratique et de l’assistante d’éducation. Ils avaient invité personnellement les autres enseignants. Aucun n’est venu. Très tendus au départ, ils ont fait une lecture de grande qualité avec une mise en espace qui reprenait les éléments de la scénographie (Papi + enfant + casque ) et les 2 portraits d’Oskar et Emile proposés par Livralire pour la lecture épicée. Très belle écoute. Félicitations des carrossiers :  » Bravo les 1G1 vous êtes formidables ». Echanges et goûter dans l’atelier que les carrossiers découvraient à cette occasion. Les cordonniers sont repartis en serrant la main aux adultes et fiers comme des pierrots. L’un d’eux a dit qu’il a envie de recommencer : « Vous comprenez Madame, je lis jamais, j’aime pas ça. C’est bizarre !  »

Passation des enfants aux ainés
Le Creusot (71). Après plusieurs répétitions en classe creusotverreavec la bibliothécaire, les enfants du CM de l’école de la Charmille sont allés à la rencontre des résidentes du Parc des Loges pour leur présenter Un Verre en lecture épicée. Le groupe des résidentes à beaucoup apprécié la venue de la classe, d’ailleurs l’une d’entre elles avait prévu un sac d’oeufs en chocolat pour les enfants. Tout le monde a trouvé ce temps de partage un peu trop court. C’est pourquoi pour la prochaine séance, les enfants présenteront deux albums : La guitare de Django et Le Pilote et le Petit Prince.

Passation des ainés aux enfants
Semur en Brionnais (71). Les ainés de l’ EHPAD Bouthier de Rochefort sont des voyageurs au long cours. semurecoleCette année, à l’initiative de leur animatrice, certains résidents sortent avec un album et le partagent avec les élèves de l’école au nom magique : l’Ile aux enfants. Deux messieurs sont venus avec Murielle présenter Un verre. Un autre jour, deux dames sont venues avec Les cinq malfoutus. Les personnages de carton, repris de la scénographie et faits par les ainés, vont ainsi petit à petit aller de la résidence à la classe. Au final, les jeunes viendront à l’EHPAD jouer un album.

Dernier jour de la semaine lecture partagée des albums au collège Mathurin Régnier pour 170 élèves, 30 bénévoles, 13 professeurs, 16 heures de lecture (2h par classe).

coffrechartres15h30 : les élèves arrivent. Leur professeur leur a annoncé une animation au CDI.
La lecture est loin d’être leur activité préférée mais c’est plutôt cool pour une dernière heure de cours ! Et puis Mme Pommereau, la documentaliste, a souvent des idées loufoques qui les font rire. Des adultes sont là, un groupe d’OVNI ou plutôt d’AVPI (adultes pas vraiment identifiés) avec lesquels les élèves vont lire les albums.

Je me retrouve avec Daryl et son copain. On s’installe, on ne fait pas vraiment connaissance, juste les prénoms. Pas la peine, on sait pourquoi on est là. On feuillette le livre en regardant les illustrations. On essaie de comprendre, pas facile. L’album parle de lecturechartresDjango Reinhardt, moi je connais un peu, Daryl et son copain pas du tout. Alors, on se décide à visionner sur l’ordinateur, un petit documentaire qui le concerne. Et là, alors qu’on se connaît juste depuis cinq minutes, on se met à partager, partager la découverte de ce personnage, chacun avec notre histoire et nos connaissances. Et on apprend ensemble. Vite, on retourne à l’album ! C’est moi qui lis. Caryl dit qu’il aime les musiciens.
Il prend un carton vert (j’aime). Il écrit. Je ne regarde pas, c’est personnel. On se dit merci, au revoir.

C’est déjà fini, les élèves sont partis. Je ne vois plus que le petit carton de Daryl. Une belle guitare est dessinée dessus.fil2 Il se balance au bout de son fil rouge au milieu d’une  forêt d’autres petits cartons. Une image s’impose à moi: des cerisiers en fleurs dans un temple bouddhiste, des centaines de petits papiers multicolores accrochés sur leurs branches, ondulent sous le vent. Les visiteurs y ont écrit leurs espoirs. Merveilleux souvenir de Chine…

Daryl et son copain, une rencontre, rapide et fugitive, qui ne restera sans doute pas dans leur esprit, mais une rencontre ! Un de ces petits et irremplaçables moments de bonheur.

Cathy, une retraitée, lectrice d’une heure

Trois semaines après la lecture partagée avec Cathy, Daryl (5e Segpa) confie à Claire, la documentaliste :
1, 2, 3 albums,  ça m’a plu, parce qu’on parle des livres. Dans les livres, il y a de l’action, des sentiments. Et il y a des personnages qui sont bien. J’aime bien les livres qu’on a choisis : les 5 malfoutus, et Django. Celui avec la guitare, ça m’a vraiment plu. Cathy nous a fait écouter la musique, j’ai aimé ça. Jouer de la guitare avec 3 doigts, c’est un truc impossible, et il a réussi à le faire. Ce serait pas pareil sans les dames, on comprendrait moins bien. On est plus concentré quand il y a les dames, on est moins stressé. A l’école, souvent, je suis stressé. Non, j’ai pas oublié la lecture. Une fois, à la télévision, y’avait de la musique, j’ai un truc qui revient à la mémoire. Ça m’a fait penser au livre de Django.

La magie du voyage opère au collège Robert Doisneau, à Chalon sur Saône.

Les objets cube et les objets colonne sont merveilleusement beaux et agréables à manipuler, beaucoup de nos élèves ont été très sensibles aux dessins subtils des cubes … La musique de la SNCF a eu un énorme succès aussi. Cette année, nous avons décidé de concentrer sur deux journées la présentation aux classes, marathonesque mais immensément gratifiant, ce qui nous a permis de mesurer aussi combien les groupes réagissent différemment aux livres, aux musiques, aux textes de présentation.

Et toujours la joie incroyable ensuite de la lecture à voix haute, Le casque d’Opapi, Les sœurs Koumba, Elle est où la ligne passent très bien. Un verre a été beaucoup réclamé, mais on sentait comme une petite déception à la lecture, donc on va se lancer dans la lecture épicée de cet album, histoire d’en faire sentir la finesse.

Autre satisfaction : des collègues, plus nombreux, qui sont venus voir en curieux et ont apprécié. Quelques îlots de résistance, très peu nombreux (mais audibles, quand même, on a l’oreille fine … ) : les élèves qui sont tellement en rejet de l’école et  de la « culture », verbalisent leur envie de ne rien lire, rien ne leur a plu. C’est balayé par la vague d’enthousiasme du groupe, et la relation très forte qui se crée pendant la scénographie, l’autorité impériale de qui sait avec certitude qu’il est bien au cœur de son métier. Ça nous conforte, Fatima et moi, dans l’idée que ces moments sont pour ces élèves une occasion de dire leur rejet, mais aussi de se dire que ça pourrait être bien aussi de se laisser aller à apprécier, quitte à risquer d’être ému … Bref, compliqué, exaltant, comme tout ce qui vaut la peine ! Encore merci à vous d’inventer ces voyages émouvants et intelligents !

Pauline Lagarde, professeur de lettres

Je reviens à l’instant de l’Ehpad La Providence après une séance lecture de 1h30. C’est toujours un grand moment d’échanges, d’émotion, de souvenirs partagés. On s’amuse aussi beaucoup. Le petit groupe est maintenant bien constitué et réceptif même s’il y a quelques assoupissements.

 Par l’intermédiaire de la lecture, les personnes âgées sont beaucoup plus dans la communication, dans la sensibilité. L’attention bienveillante qu’elles se portent les unes aux autres par  l’écoute des propos ou souvenirs évoqués est, me semble-t-il,  un gage de « réussite » du moment passé avec elles.

 Aujourd’hui, j’ai lu, Un verre et La guitare de Django avec en fond la musique de Django. Deux superbes lectures aux tonalités différentes mais où la sensibilité peut s’exprimer. L’une des résidentes a vécu à Paris où elle était couturière : j’ai vu son album photos avec les robes qu’elle avait cousues pour Edith Piaf. Elle était très émue car elle a connu le fils de Django.

 Voilà, il y aurait encore maintes choses à dire, d’anecdotes à raconter mais vraiment ce moment de lecture partagée me comble à chaque fois.

Dominique Metzger  

A la résidence, la première lecture épicée a eu lieu vendredi 27 mars autour du Casque d’Opapi devant quatorze participants si calmes lors de la lecture que je me suis demandé si cela les  intéressait. Le silence était en fait signe de grande attention. J’ai complété la lecture par un extrait d’un livre de témoignages de poilus.

S’en est suivie une assez longue discussion sur la première guerre mais aussi sur la seconde et puis sur les événements récents autour du fanatisme. Le plus difficile sur ce sujet a été de rester positif et d’espérer en la paix. Mais cela a été riche de témoignages et de partage notamment grâce à la présence d’un fils d’une des résidentes présentes.

Quand j’ai demandé si quelqu’un voulait prendre les deux livres, une résidente a proposé de les emprunter pour les lire aux personnes qui ne peuvent plus bouger ou qui n’avaient pas souhaité venir.  Cette lectrice spontanée  a lu  Le casque d’Opapi à une dame dans sa chambre et lui a, du coup, donné envie de venir à la prochaine séance collective.

Arnaud GINIONS, animateur à  Ehpad Notre Dame de Marloux (71)

A Béthusy, nous entamons notre troisième voyage-lecture avec une classe d’accueil dont les élèves, entre 13 et 16 ans, sont allophones et sont au tout début de leur apprentissage du français.

Vendredi 13 mars, nous avons rendu visite aux seniors de l’accueil de jour de Mont-Calme à deux pas de notre collège pour assister à la scénographie préparée par nos collègues de la Bibliothèque de la Ville de Lausanne. Deux semaines plus tard, nous avons accueilli nos invités en classe pour un après-midi de rencontre et de lecture épicée.

Les élèves avaient choisi de présenter La guitare de Django sous forme de lecture polyphonique agrémentée d’un kamishibaï préparé par leurs soins. Entre les répliques, la guitare d’un jeune et celle de Django ont résonné aux oreilles des voyageurs. Les voix des élèves, riches de leur couleur internationale, se sont élevées fortes et encouragées par leurs invités qui avaient envie de tout entendre. Nous avons été émus, nous avons ri et nous avons appris à nous connaître. Parmi nos invitées, certaines pensent que les jeunes d’aujourd’hui sont beaucoup plus intelligents qu’avant… Sauront-ils faire honneur à la foi de leur nouvelle amie? Nous avons très envie d’y croire.

Ce moment de partage nous a fait voyager du Paris de Django au Paris d’aujourd’hui en passant par le Brésil, la Turquie, le Canada, l’Italie, les Etats-Unis, la Roumanie, la Chine, la Thaïlande, le Portugal, l’Espagne, la Hollande et bien sûr la Suisse. Cette fois-ci, le manouche aux doigts féeriques aura été un très beau trait d’union entre les êtres au-delà des générations. Sur fond de jazz, nous nous réjouissons de notre prochaine rencontre à Mont-Calme.

Sophie, Bibliothécaire à Béthusy (Suisse)