Le hasard fait parfois bien les choses. Le 9 décembre, je sortais d’une après-midi à la maison des acteurs du Paris durable, dans le Marais, où j’avais écouté un jeune agronome parler de son travail sur les prairies sous-marines en Méditerranée. Passant devant l’ancienne halle du quartier, je vois du monde s’y presser pour un salon de la BD. J’entre juste par curiosité, car je ne suis pas une grande amatrice de ce genre. Mais surprise, je reconnais dans un angle du bâtiment les grands aplats bleus de l’album Méditerranée. L’auteur serait-il dans les parages ? Oui, il sera là dans un petit moment, me dit-on.

Quinze minutes plus tard, je le trouve derrière une table recouverte d’une nappe bleue, en train de dédicacer ses ouvrages à l’encre noire.
« Pour moi le Marseillais, cet album c’est un cri de rage, un coup de gueule face au cimetière marin qu’est la Méditerranée. Un jour après l’annonce d’un nouveau naufrage, j’ai étalé des feuilles blanches par terre et, en 15  minutes, j’avais brossé toutes les vagues bleues. Il n’y avait plus qu’à écrire un texte et à faire publier l’album par Gallimard qui le trouvait  bien dur pour des jeunes mais voulait tout de même en être l’éditeur ! Le dilemme sera résolu en omettant volontairement la mention jeunesse ! »
Baudoin a eu l’air sincèrement touché par le fait que son album serait lu par des gens de 10 à 100 ans. J’espère pouvoir lui transmettre les retours des lecteurs.
VML

La tournée de lancement du 12e voyage-lecture intergénérationnel est terminée. Les participants, routards, novices ou découvreurs, ont dit apprécier particulièrement la mise en bouche des albums avec les oiseaux comme témoins des histoires du monde

La scénographie de présentation des albums, légère et peu coûteuse à monter, est diffusée en kit à tous les animateurs du voyage-lecture déclarés. A eux de la préparer (éventuellement se la prêter), se l’approprier, la répéter (à l’aide du film disponible à partir du 12 décembre) puis la jouer devant des groupes ciblés et/ou, comme le feront plusieurs bibliothécaires, devant des individuels rassemblés à l’occasion de la nuit de la lecture, le 20 janvier 2018.
VML

Dernière rencontre de la saison 12, à la médiathèque Départementale de l’Allier, à Coulandon précisément, qui accueille aussi quelques voyageurs nivernais isolés mais accros. Ce déplacement fut aussi l’occasion, pour moi,  d’aller au musée de l’illustration admirer les magnifiques oiseaux de Carl Cneut dont l’expo « Exubérance & Beauté » est ouverte jusqu’au 7 janvier 2018.

Paroles de novices …
A Saint Pourçain-sur-Sioule, Karine entraîne des aînées à la présentation des albums aux CM à qui elles prêtent leurs livres un long moment. Elle doit veiller à ce que chacune ait sa place car les dames ne se font pas de cadeau, jugeant que celle là ne pourra pas lire ou que celle-ci ne sait pas lire.

Parole de routards …
Au lycée professionnel de Gannat, déjà 4 voyages avec des 2e.
Elèves nouveaux  +  professeurs différents = voyage chaque fois renouvelé.
Pour la saison passée, les jeunes ont bénéficié par petits groupes de l’accompagnement d’une conteuse qui leur a fait travailler les restitutions orales. Pour Le dernier voyage, ils ont créé un texte qu’ils ont chanté en cercle. Grand moment !

Au collège Charles Péguy de Moulins, voyage avec des élèves de classe ULIS qui ne prennent pas d’eux-mêmes un album mais sont très sensibles à la prescription d’un pair : « Tu connais pas ? » ou  « Tu devrais prendre ça ».

Pour Maud, soignante à l’accueil de jour de l’hôpital de Decize, on avance lentement mais sûrement. La lecture partagée des albums chaque vendredi après-midi permet aux patients d’enrichir leur vocabulaire, de s’exprimer, d’avoir un cadre  (qu’il n’ont pas, faute de tissu social) pour parler de choses difficiles. Sa collègue, à La Charité-sur-Loire, montre des dessins faits à l’atelier d’arts et exposé dans la cour de leur établissement à l’occasion de la « Grande Lessive » avant d’être rassemblés dans un classeur.

Au Donjon, 1, 2 3 albums rassemblent des 6e et des résidents de l’Ehpad dont quelques uns très cultivés apportent un vrai plus et font aux jeunes de la pub pour la lecture.

Paroles de découvreurs…
Je ne regrette pas ma matinée. On va se lancer.

VM L

Vendredi 28 novembre. Plus de 70 personnes auxquelles s’est jointe l’équipe, adulte et jeunesse, conséquente et efficace de la Médiathèque départementale qui contribue beaucoup au rayonnement du projet en Côte-d’Or.

Paroles de novices…
Isabelle venue de Belfort : c’est difficile de mener le projet seule. Mieux vaut prévoir des relais ou voyager en binôme. Quand je suis partie en congé de maternité, l’aventure s’est arrêtée pour les jeunes suivis par la protection judiciaire de la jeunesse avec qui je lisais des albums. C’est dommage, d’autant que certains ne savent pas lire ou considèrent la lecture comme une activité de vieux.

Parole de routards …
A Neuilly-les-Dijon, les aînés aimeraient des histoires plus légères. Alors les bibliothécaires terminent chaque rencontre par une histoire drôle. En contrepoint, Catherine, professeur de lettres à Talant, estime que c’est le sérieux des histoires qui fait le piment des échanges et le ciment des créations.

Elodie, à l’Ehpad de Nolay, avoue qu’elle a pu donner de la puissance à ses lectures épicées après avoir participé à l’atelier pratique proposé par la MCO dans ses offres de formation.  Celle du Dernier voyage a provoqué des larmes et un silence intense suivi… d’une salve d’applaudissements.

Au collège de Nolay, Anne mène 1, 2, 3 albums avec des 5e dans le cadre des AP (Ateliers Personnalisés). Les lecteurs doivent faire à plusieurs une restitution écrite sous la forme de leur choix. L’activité est très (trop) difficile pour certains groupes. Un jour, en rentrant d’une rencontre avec les aînés, les adultes prennent le temps d’un debriefing. Des résidents avaient pleuré au moment de se séparer des collégiens qui avaient apporté de la vie.  « On peut donc apporter quelque chose », ont dit les jeunes les plus difficiles !

Paroles de découvreurs…
Merci encore pour cette belle après- midi très intéressante. Un vrai foisonnement d’idées et des rencontres autour de notre désir commun de faire aimer la lecture. Les albums sont magnifiques.
VML

Vendredi 24 novembre. Salle comble à la BDP de l’Ain avec des habitués et des nouveaux. Beaucoup de collèges sont représentés. Agréable surprise de voir plusieurs enseignants de primaire ralliés au voyage-lecture intergénérationnel par la liaison CM2-6e, encouragés par leur inspecteur et donc remplacés pour la journée !

Paroles de novices …
A la bibliothèque d’Ambérieu, Brigitte cherchait une animation lecture pour adultes. Avec sa collègue Céline, elle a proposé  1, 2, 3 albums à l’animatrice du centre social qui a constitué un groupe hétéroclite. Elles se sont astreintes à des rendez-vous réguliers, utilisant les lectures épicées. La difficulté a été de canaliser le groupe. Deux beaux souvenirs : une personne avoue d’entrée de jeu qu’elle n’aime pas lire. La lecture finie, elle veut acheter le livre. Un autre dit : c’est super, j’ai retrouvé mon âme d’enfant. L’espace lecture avec canapé installé depuis remporte du succès.

A Montceaux, Karine a navigué à vue pour son premier embarquement avec plusieurs classes de  6e et de CM2. Elle se sent plus aguerrie pour celui-ci.

Parole de routards …
A Bagé-la-Ville, des élèves de 6e volontaires ont joué la scénographie en séance publique à  la bibliothèque devant un public …quasi inexistant (com à revoir) sauf un papa souvent absent de la maison qui a pris le temps de venir écouter sa fille, fière de jouer pour lui !

Murielle a animé 7 fois 1, 2, 3 albums dans son Ehpad. Cette voyageuse expérimentée confie que :
– les difficultés varient d’une année à l’autre.
– qu’il ne faut pas faire le tri des albums en décidant pour les anciens de ce qui est bon ou pas pour eux.
– qu’il faut rester humble. Les échanges se font parfois autour d’une seule image de l’album.
– que dans les secteurs protégés, il peut y avoir des résidents capables d’être intéressés. La lecture partagée des albums est alors l’occasion de les intégrer aux autres.

Paroles de découvreurs…
Une jeune fille en formation par alternance de me dire : « A l’école, un professeur nous a parlé d’1, 2 ,3 albums. Maintenant je vois les choses derrière vos mots. Et si vous interveniez dans notre cursus de formation d’animateur social ? » Pourquoi pas, d’autant que l’école est en Saône-et-Loire. A suivre.

« C’est le label intergénérationnel qui m’a fait venir. Ne le changez pas pour solidaires, même si, de fait, les lectures le sont souvent avec 1, 2, 3 albums. »
VML

Mercredi 22 novembre, 35 personnes venues des lacs et des montagnes, accueillies à Bibliomedia et charmées par la scénographie jouée avec Myriam, bibliothécaire à Lausanne, et considérée par un enseignant comme le « haut-fait » des rencontres !

Parole de routards …
A Fleurier, Christine a vécu deux moments émouvants : un rapprochement et un départ.
–  J’ai revu ma grand-mère, lui dit une de ses élèves. Mes parents sont brouillés avec elle. On ne va plus la voir à l’IMS. Alors quand je l’ai vue à la rencontre 1, 2, 3 albums, j’étais contente de l’embrasser.
– Pour atténuer la tristesse d’une élève qui doit déménager, la classe lui offre l’album Malala,  signé de tous.

Karina, animatrice raconte la difficulté des aînés à comprendre les adolescents primo arrivants qui parlent un français hésitant avec un fort accent mais en même temps leur curiosité à les questionner sur leurs « natels » (portables) et autres objets d’aujourd’hui.

Camille, éducatrice de jeunes adultes réfugiés est frappée par leur bienveillance vis-à-vis des aînés qu’ils rencontrent grâce à 1, 2, 3 albums et par l’ouverture que ça apporte aux seniors de côtoyer des gens d’ailleurs. Se constituent même parfois des binômes de lecture improbables !

Paroles de découvreurs…
Une bibliothécaire d’un petit village séduite par le projet pense au colportage chez des gens isolés. Seulement, il va falloir avec son équipe convaincre la municipalité qui ne voyant pas l’intérêt du portage de livres à domicile, avait mis précédemment son veto sur ce type d’offre de lectures.
VML

Vendredi 17 novembre, 70 personnes sont accueillies à la médiathèque de Mâcon grâce à l’aide efficace de Christine, bibliothécaire voyageuse au long cours, et celle de l’équipe de Livralire réunie pour l’occasion même si aucun flash n’a immortalisé ce rituel annuel de l’association. En resteront le film de la scénographie tourné l’après-midi par Fanny Maugey et les témoignages que voici.

Parole de novices …
Pas facile mais très encourageant, le premier voyage, racontent la bibliothécaire et un professeur du collège de Sanvignes. Après lecture, les élèves ont été invités à préparer en groupe la présentation d’un album à des aînés. Ceux qui se définissent comme non lecteurs et sur qui les enseignants n’auraient rien parié se sont pris au jeu. Bien sûr il a fallu les accompagner mais le résultat est à la mesure de l’investissement des adultes et des jeunes.
Dommage que leurs voix aient été  trop faibles pour être entendues des anciens dont la participation à la rencontre a été handicapée par l’horaire, plus favorable à la sieste.

Parole de routards …
A l’accueil de jour d’Hurigny (ESAT),  pas facile de partager des textes longs avec les participants adultes dont les capacités de mémoire sont limitées. Par contre, ils apprécient les  histoires qui les ramènent à leur vie et celles qui sont prolongées par de la musique ou des films. Exemple, le visionnage du DVD «  Sur le chemin de l’école » après la rencontre avec Malala.

A l’école de Replonges, dans l’Ain mais à la frontière de la Saône-et-Loire, Emmanuel, l’enseignant de  CM2 a déjà fait 5 fois 1, 2, 3 albums. Le dernier voyage-lecture était non seulement littéraire mais sportif. Le déplacement en bus pour aller partager des albums au collège coûtant trop cher, ils l’ont fait à vélo avec l’aval de l’inspection et l’aide des parents qui ont obtenu l’agrément et ont été ébahis de voir qu’on pouvait aborder à 10 ans des thèmes aussi puissants.

Paroles de découvreurs…
Une animatrice d’Ehpad est venue au lancement, l’esprit aiguisé par une lecture épicée d’albums à laquelle l’avaient conviée au printemps deux collègues d’un autre établissement qui la jouaient pour les résidents. Etant aussi art-thérapeute, elle pense déjà à faire créer un tableau par album.
VM Lombard