Cette année, à la bibliothèque Montriond de Lausanne, nous avons embarqué avec :
– quatre maisons de retraite (= EMS)
– un complexe d’appartements protégés
– une classe de jeunes émigrés en recherche d’emploi
– deux classes du secondaire par l’intermédiaire des bibliothécaires scolaires
– un groupe de femmes de l’association « Appartenance » (accueils aux migrants)
Les rencontres entre les jeunes et les aînés ont été très belles : les participants, contents, parlent déjà de la façon dont ils procéderont l’année prochaine. Ils ont tous acquis une belle autonomie et nous les suivons de loin en loin, après la présentation scénographiée.
Les rencontres entre le groupe de jeunes migrants et la Fondation de l’Orme (psycho-gériatrie) restent chères à notre cœur d’année en année. Lors de la présentation des 10 albums, tous semblent s’observer du coin de l’œil, puis, peu à peu, au cours des rencontres organisées par l’animatrice et le maître de classe, les contacts s’établissent avec une grande pudeur, les connivences s’installent.
Dans deux EMS, nous avons animé des lectures épicées. A chaque rencontre, alors que nous rappelions qui nous étions et ce que nous venions faire, il y avait deux ou trois dames qui ne se rappelaient pas de notre dernier passage, nous demandaient des précisions à son sujet et finissaient par s’exclamer que, bien sûr, elles ne pouvaient pas s’en souvenir, puisqu’elles étaient arrivées là il y a 3 jours à peine ! Néanmoins, à chaque rendez-vous, une certaine familiarité s’est installée entre nous et j’ai à chaque fois observé et été émue d’assister à l’éveil provoqué par les lectures.
Chacune des résidentes avait une histoire différente, face au livre et à la lecture : certaines avaient beaucoup lu, lisaient encore, d’autres pas du tout. Mais toutes se retrouvaient dans un même groupe et écoutaient ensemble la même histoire : c’est une expérience que nous connaissons dans l’accueil des classes, où des enfants de milieux différents reçoivent la même animation et réagissent chacun à leur façon. Cette fois-ci, nous l’avons vécu avec des aînés, de l’autre côté du chemin de la vie.
Avec ces dames, j’ai appris la valeur du présent et de la gratuité : lors de chaque rencontre, nous avons vécu un moment unique de lecture et de partage, pas très long mais intense. Les yeux illuminés et les joues colorées, les ainées auront vécu un moment de joie. Moi, j’ai reçu leurs souvenirs et la chaleur de la rencontre.
Et tout cela pour le seul plaisir d’un moment de partage, sans vouloir en laisser une trace, ni attirer des lecteurs en bibliothèque, ni augmenter nos statistiques de prêts, ou autre. Pour cela, je suis profondément reconnaissante à ma direction qui nous permet de vivre de tels moments et à l’association Livralire qui nous offre la possibilité et les moyens de le faire. Sans la préparation faite en amont (choix des livres, scénographie et lectures épicées, pour ne citer que le principal), il ne nous serait pas possible de réaliser un tel projet. A l’heure de la clôture de ce 9e 1, 2, 3 albums, je suis emplie de gratitude et me réjouis de l’année prochaine, en espérant retrouver les mêmes acteurs… et faire de nouvelles rencontres !
Isabelle CARDIS, responsable de la bibliothèque Montriond (Lausanne)
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