Belle expérience que ces deux scénographies jouées dans un lycée professionnel parisien du 13e, en binôme avec Cécile Beyer, documentaliste-stagiaire (CAPES), après plusieurs années au CDI du Campus des métiers (93), dont deux à animer 1, 2, 3 albums (voir ses témoignages en 2015 et 2014).
Quel enseignement tirer des deux rencontres avec des élèves électriciens peu enclins à la lecture et à l’écoute ? Réponse : Voir le bon côté des choses.
Le CDI est trop petit pour recevoir trois classes. L’immense préau fera l’affaire. On tire des bancs dans un coin, on récupère deux tables disparates (j’y étale un carton pour que la nappe noire ne glisse pas). Les escabeaux n’ont pas la même taille. Le cadre vieillot est contrebalancé par un système de sonorisation moderne: tablette et enceinte de poche. Promis, Livralire s’y mettra l’an prochain.
L’écoute est discontinue. Les jeunes « lancent des vannes », s’invectivent, surtout à la séance du lundi. En fait, ils réagissent à ce qui est raconté. Ils sont présents à leur façon. Un seul a sorti son portable : les professeurs estiment que c’est déjà une marque d’intérêt. Il y a des moments dynamiques comme les réponses- qui fusent – aux devinettes, lancées du pupitre par la voix 2 et des moments de grâce notamment lors des séquences musicales. Etonnant vu le choix éloigné de leur univers. Certains jeunes sont très attentifs à ce qui se passe, sans doute saisis par la beauté des dessins et des gestes, comme l’a souligné un enseignant. Le travail de conception et de répétition paye.
Les jeunes se ruent sur le buffet, offert par Cécile, plus que sur les albums et pourtant dès le mardi matin, certains lui réclament l’histoire du footballeur (Carton rouge), d’autres celle des animaux qui ont envahi le château (L’Etrange zoo de Lavardens). Les enseignants des matières générales ou techniques, tendus pendant notre prestation du fait du comportement imprévisible des élèves, réagissent positivement et attendent Cécile pour les lectures épicées. L’un, d’origine marocaine, nous raconte la version du faux banquet que lui racontait sa grand-mère. Nasreddin aurait utilisé ce mensonge pour éloigner des enfants bagarreurs. Ce prof a plein d’histoires de cet ingénu à partager avec ses élèves. Les petites histoires du monde lui en donne l’occasion.
Sitôt la deuxième scénographie achevée, Cécile prépare avec sa collègue des pots de fleurs pour que les lecteurs matérialisent leur ressenti de lecture sous forme de pétales de trois couleurs différentes. L’aventure est officiellement lancée.
VML