Il y a des animateurs de voyage qui trouvent que certains albums, même partagés sous forme de lecture épicée, sont trop courts pour occuper le temps dédié à un atelier ou une rencontre. Et d’en proposer trois de suite. Attention au gavage !
Et pourtant d’autres livres (ou vidéos) gagnent à être rattachés à l’album par le thème, le cadre, un personnage, une question, une ouverture.
Exemple au collège d’Aigle.
Les albums d’Etienne Delessert après la lecture d’un Verre
On regarde et discute des petits personnages qui sont dans le verre puis on observe quelques illustrations de Delessert: – Yok Yok – et celles du livre J’aime pas lire. Ce dernier est écrit par la femme de Delessert, Rita Marshall et illustré par lui-même. Cela nous a permis d’expliquer que sa mère a éveillé son imaginaire grâce aux différentes activités qu’ils faisaient ensemble et que les personnages qu’il a imaginés pour les illustrations de ses livres viennent de là. Le garçon -personnage principal du livre J’aime pas lire – Victor Dickens – finit pas se faire attirer dans le monde imaginaire par un crocodile tout droit sorti d’un livre !…. un peu comme Delessert, petit garçon, initié au monde imaginaire par sa mère.
Les Bédik, peuple de la vallée heureuse (une vidéo) après les Soeurs Koumba.
Ont aussi été proposés ici et là :
– Le conte en version audio Les fées de Perrault qui a inspiré l’album Les sœurs Koumba
– Des lettres de poilus, un documentaire comme La guerre 14-18 raconté aux enfants (De La Martinière) pour Le Casque d’Opapi
– Des documentaires sur les habitats animaliers, les maisons du monde ou des architectures hors du commun après Un Toit pour moi
– Une lecture en diagonale du Petit prince, en appui sur les dessins agrandis des six planètes traversées par le petit héros.
Relier les albums sélectionnés à d’autres supports peut se faire séance après séance ou être l’objet d’une animation spécifique à la bibliothèque municipale. Les voyageurs y sont accueillis pour une dégustation d’images et de textes en lien avec les lectures déjà faites.
Façon de faire connaître le lieu, de décloisonner les secteurs, de faire vivre le fonds.
VML
Nous, animatrices, sommes d’année en année conquises et ravies de la richesse des savoirs des anciens et de leur générosité à échanger ou à transmettre leur vécu, à partir des albums. Dès la présentation de la scénographie se dessinent des préférences. D’un commun accord, nous commençons par ces livres là.
Nous installons les chaises en cercle, pour faciliter l’échange et l’intimité. Sur une table, nous plaçons en évidence la cagette correspondante au livre du jour. Les résidents sont ensuite invités et accompagnés en salle d’animation. On se salue, on fait le point sur l’avancée des lectures. Puis place à la nouvelle histoire. On lit souvent à deux voix (après s’être exercé) et on se sert des personnages et des cubes. Ça fonctionne, les résidents sont attentifs, restent concentrés et s’endorment moins au milieu de l’histoire…Le livre passe au début et à la fin de main en main pour que ceux qui le souhaitent puissent admirer et/ou commenter les illustrations.
Le pilote et le petit prince
On parle de Saint Exupéry que beaucoup connaissent : son nom a été donné à un aéroport français.
Saint Exupéry a commencé comme mécano. Il aurait pu être pilote de chasse mais il n’a jamais voulu tuer ! Il avait deux passions : voler et écrire, voler lui donnait envie d’écrire et écrire le faisait s’envoler. On parle du Petit prince, on se remémore ensemble l’histoire. On parle d’autres livres tels que Vol de nuit, Courrier Sud, La bicyclette bleue. On évoque d’autres aviateurs connus tels Mermoz ou Blériot. Chacun parle de son baptême de l’air et y va de sa petite histoire. On parle des aérodromes qui se trouvent dans la région et des fêtes de l’aviation qui s’y déroulent parfois. Et pour finir on décide, d’un commun accord, de programmer une sortie sur ce thème.
La guitare de Django
Tous se souviennent du grand musicien de jazz : Django, c’est comme Mathusalem, on n’en connaît qu’un ! Une dame, mannequin à Paris dans sa jeunesse nous relate sa rencontre avec Django lors d’une soirée cabaret. Elle se souvient bien de lui. On parle musique, goûts musicaux, jazz.
Moi, j’aime le jazz primitif style Duke Ellington ou Django mais pas tous les succès qui en dégoulinent.
On décide d’acheter un CD de Django que l’on écoutera dans le cadre de certaines activités d’animation.
Sylviane Teillard anime 1, 2, 3 albums avec Jacqueline Zerbini à la résidence des Vignes à Grenoble. Comment résumer leur journal de voyage envoyé à Livralire ?
Organisation
– Les voyageurs-lecteurs se réunissent régulièrement pendant plus de deux heures dans l’appartement d’une résidente nonagénaire active.
– L’association « Livres et palabres » (Alpes d’Huez) a acheté un pack d’albums qui a été complété par des prêts des bibliothèques grenobloises qui n’avaient pas les livres mais ont honoré les suggestions d’achat.
– A chaque rencontre, on peut emprunter un album, de sorte que certains les connaissent avant la présentation collective.
Contenu
– Les lectures épicées sont largement utilisées et étoffées de visuels, musiques, textes ou livres complémentaires.
– Les souvenirs affluent. Une dame regrette de n’avoir pas voulu accompagner son père au Bourget lors d’une fête où Antoine de Saint Exupéry en personne était une des vedettes. Une autre est médusée : après la guerre, invitée à un concert de Django, elle n’avait pas remarqué sa main estropiée. Un monsieur évoque la guerre. Un autre ses franchissements de ligne blanche et les dommages collatéraux.
Premier bilan
– Le suivi est difficile du fait de l’état de santé précaire de certains ainés et de l’accompagnement-lecture épisodique.
– L’opération permet de croiser des points de vue, facilite les échanges interpersonnels et des évocations d’enfance, ce qui est gratifiant pour les participants.
– Les albums n’ont pas tous la même force, mais les plus courts ne sont pas les moins forts.
– Les participants ont envie de présenter leur album préféré à d’autres.
VML
La bibliothèque de Déols dans L’Indre organise régulièrement un café-lecture. Celui sur les albums a attiré moins de monde que d’habitude mais la douzaine de participantes (Les albums feraient-ils peur aux hommes ?) ont été emballées et ont emprunté les albums dans la foulée.
C’est décidé : nous le ferons désormais à chaque printemps.
Depuis quelques mois, nous avons aussi mis un bac à albums pour les « grand-large », stratégiquement placé entre enfants et adultes, et, grâce aussi aux diverses présentations qu’on assure, ils vivent mieux !
Véronique Lottaz, bibliothécaire
Daniel Picouly et Nathalie Novi ont reçu en 2014 le prix Amerigo Vespucci jeunesse pour leur album Et si on redessinait le monde ?
Dans cet interview de l’artiste, on apprend que les peintures ont précédé le texte et que chacune contient des références littéraires ou des souvenirs. Seule la ribambelle finale a été inspirée par l’auteur.
L’équipe de la Bibliothèque Municipale de Loyettes (Ain) a invité trois classes de CM1/CM2 à voyager dans les albums « grand large ».
Pour la classe pilotée par deux personnes (la directrice et une enseignante), les séances se déroulent en trois temps à l’école :
– Le vendredi pour toute la classe : lecture offerte de l’album par l’enseignante
– Le mardi suivant : trois ateliers successifs de trente minutes pour les élèves répartis en trois groupes, menés chacun par un adulte différent : la bibliothécaire et les deux enseignantes.
1/ Discussion sur le sens de l’histoire. Explications. Notions de philosophie, d’histoire…
2/ Répétition de la scénographie en vue d’une passation aux familles courant mai.
3/Arts visuels avec techniques variées. Les créations plastiques seront photographiées et projetées lors de la présentation de la scénographie aux parents et grands-parents des enfants.
Nathalie Bernard, bibliothécaire
Des échos reçus récemment, trois illustrent bien ce qui fait le fondement d’1, 2, 3 albums à savoir la transmission des histoires : lire pour soi et lire pour les autres. Et pas toujours dans le sens qu’on croit. Se rappeler des témoignages de l’an passé où des patients lisaient aux soignants, et des lycéens à leurs professeurs.
Passation entre pairs
Campus des métiers à Bobigny (93). Les cordonniers ont fait, dans leur atelier, une lecture collective du Casque d’Opapi à des Bacs pro carrossiers, en présence de leur professeur de pratique et de l’assistante d’éducation. Ils avaient invité personnellement les autres enseignants. Aucun n’est venu. Très tendus au départ, ils ont fait une lecture de grande qualité avec une mise en espace qui reprenait les éléments de la scénographie (Papi + enfant + casque ) et les 2 portraits d’Oskar et Emile proposés par Livralire pour la lecture épicée. Très belle écoute. Félicitations des carrossiers : » Bravo les 1G1 vous êtes formidables ». Echanges et goûter dans l’atelier que les carrossiers découvraient à cette occasion. Les cordonniers sont repartis en serrant la main aux adultes et fiers comme des pierrots. L’un d’eux a dit qu’il a envie de recommencer : « Vous comprenez Madame, je lis jamais, j’aime pas ça. C’est bizarre ! »
Passation des enfants aux ainés
Le Creusot (71). Après plusieurs répétitions en classe avec la bibliothécaire, les enfants du CM de l’école de la Charmille sont allés à la rencontre des résidentes du Parc des Loges pour leur présenter Un Verre en lecture épicée. Le groupe des résidentes à beaucoup apprécié la venue de la classe, d’ailleurs l’une d’entre elles avait prévu un sac d’oeufs en chocolat pour les enfants. Tout le monde a trouvé ce temps de partage un peu trop court. C’est pourquoi pour la prochaine séance, les enfants présenteront deux albums : La guitare de Django et Le Pilote et le Petit Prince.
Passation des ainés aux enfants
Semur en Brionnais (71). Les ainés de l’ EHPAD Bouthier de Rochefort sont des voyageurs au long cours. Cette année, à l’initiative de leur animatrice, certains résidents sortent avec un album et le partagent avec les élèves de l’école au nom magique : l’Ile aux enfants. Deux messieurs sont venus avec Murielle présenter Un verre. Un autre jour, deux dames sont venues avec Les cinq malfoutus. Les personnages de carton, repris de la scénographie et faits par les ainés, vont ainsi petit à petit aller de la résidence à la classe. Au final, les jeunes viendront à l’EHPAD jouer un album.
Nous sommes des élèves de terminale BAC professionnel, services aux personnes et aux territoires au LEAP de la Bresse à Louhans-Châteaurenaud. Dans le cadre de notre formation et en lien avec Emilie Perdrix de la bibliothèque municipale, nous avons organisé une lecture partagée de l’album Et si on redessinait le monde ?
La rencontre avec des aînés s’est déroulée en deux temps :
– la lecture d’extraits
– le coloriage d’un planisphère. On s’est réparti et mélangé avec les aînés autour de tables recouvertes d’un planisphère vierge de format A3, de crayons de couleur et de feutres.
A chaque groupe de le remplir et de le colorier. Les aînés donnaient surtout des idées aux jeunes qui les dessinaient. Certains ont pris aussi les crayons. Puis chaque groupe a commenté ses illustrations centrées sur la paix dans le monde, l’amour (des cœurs), la nourriture pour tout le monde.
Pour mener à bien ce projet et avoir suffisamment d’albums, nous avons eu l’aide financière de la banque populaire à Louhans et de l’entreprise de salaison Bolard à Saint Amour que nous remercions.
Élodie Bardon, Séréna Crochat, Océane Bert, Sabrina Peutot
Dernier jour de la semaine lecture partagée des albums au collège Mathurin Régnier pour 170 élèves, 30 bénévoles, 13 professeurs, 16 heures de lecture (2h par classe).
15h30 : les élèves arrivent. Leur professeur leur a annoncé une animation au CDI.
La lecture est loin d’être leur activité préférée mais c’est plutôt cool pour une dernière heure de cours ! Et puis Mme Pommereau, la documentaliste, a souvent des idées loufoques qui les font rire. Des adultes sont là, un groupe d’OVNI ou plutôt d’AVPI (adultes pas vraiment identifiés) avec lesquels les élèves vont lire les albums.
Je me retrouve avec Daryl et son copain. On s’installe, on ne fait pas vraiment connaissance, juste les prénoms. Pas la peine, on sait pourquoi on est là. On feuillette le livre en regardant les illustrations. On essaie de comprendre, pas facile. L’album parle de Django Reinhardt, moi je connais un peu, Daryl et son copain pas du tout. Alors, on se décide à visionner sur l’ordinateur, un petit documentaire qui le concerne. Et là, alors qu’on se connaît juste depuis cinq minutes, on se met à partager, partager la découverte de ce personnage, chacun avec notre histoire et nos connaissances. Et on apprend ensemble. Vite, on retourne à l’album ! C’est moi qui lis. Caryl dit qu’il aime les musiciens.
Il prend un carton vert (j’aime). Il écrit. Je ne regarde pas, c’est personnel. On se dit merci, au revoir.
C’est déjà fini, les élèves sont partis. Je ne vois plus que le petit carton de Daryl. Une belle guitare est dessinée dessus. Il se balance au bout de son fil rouge au milieu d’une forêt d’autres petits cartons. Une image s’impose à moi: des cerisiers en fleurs dans un temple bouddhiste, des centaines de petits papiers multicolores accrochés sur leurs branches, ondulent sous le vent. Les visiteurs y ont écrit leurs espoirs. Merveilleux souvenir de Chine…
Daryl et son copain, une rencontre, rapide et fugitive, qui ne restera sans doute pas dans leur esprit, mais une rencontre ! Un de ces petits et irremplaçables moments de bonheur.
Cathy, une retraitée, lectrice d’une heure
Trois semaines après la lecture partagée avec Cathy, Daryl (5e Segpa) confie à Claire, la documentaliste :
1, 2, 3 albums, ça m’a plu, parce qu’on parle des livres. Dans les livres, il y a de l’action, des sentiments. Et il y a des personnages qui sont bien. J’aime bien les livres qu’on a choisis : les 5 malfoutus, et Django. Celui avec la guitare, ça m’a vraiment plu. Cathy nous a fait écouter la musique, j’ai aimé ça. Jouer de la guitare avec 3 doigts, c’est un truc impossible, et il a réussi à le faire. Ce serait pas pareil sans les dames, on comprendrait moins bien. On est plus concentré quand il y a les dames, on est moins stressé. A l’école, souvent, je suis stressé. Non, j’ai pas oublié la lecture. Une fois, à la télévision, y’avait de la musique, j’ai un truc qui revient à la mémoire. Ça m’a fait penser au livre de Django.