Après que nous ayons, un collègue et moi, joué la scénographie à leurs résidents, la direction de l’Ehpad La source de Mondeville (14) a décidé d’intégrer une plasticienne au projet.

Chaque lundi matin, Isabelle Lecordier anime à l’Ehpad un atelier d’Art Plastiques qui s’inspire des albums de la sélection 2018-2019. Les résidents sont invités, à créer, en utilisant des matériaux de récupération, des arbres à palabre pour illustrer en trois dimensions des albums de la sélection.

 

Pour chaque arbre, la plasticienne propose aux personnes âgées des techniques particulières : peinture à l’encre, collage, découpage…Les œuvres seront exposés lors de la semaine de la nature en mai prochain à l’Ehpad : une belle façon d’illustrer et de donner une autre facette visuelle aux albums ! Exemples : collage de gauche, La princesse au mille et une perles / frise de droite, création en cours inspirée de Liberté à congo square.

Arnaud, bibliothécaire à Mondeville (Calvados)

Pour chaque album sélectionné pour 1, 2, 3 albums, Livralire imagine une lecture collective dynamique, partielle ou complète, brute ou mise en scène, appelée lecture épicée.

Les 50 personnes qui ont participé cet hiver aux 3 ateliers de lecture épicées s’accordent à dire que, dans ces journées de travaux pratiques, on apprend autant à regarder les autres qu’à faire et qu’une lecture épicée réussie est une lecture qui :
– entraîne sans effort l’auditoire dans un récit
– éclaire l’histoire en mettant en avant un ou plusieurs aspects
– donne envie de lire soi-même l’album ou de regarder les illustrations de plus près.

L’impact tient en partie aux conditions de réalisation :
1/ Le placement du public : vérifier que chacun est bien installé et voit correctement et complètement.
2/ Le décor : éviter les fonds chargés ou animés  (la rue) qui distraient. Si besoin mettre une toile unie en fond.
3/ La manière de tenir le texte papier : faire en sorte que les feuilles de texte ne fassent pas écran (ne pas les tenir devant les yeux). Les installer derrière le pupitre ou chevalet où sont présentés les visuels, sur ses genoux (quand Ruby raconte son enfance sur une chaise face au public / pour la lecture du Jardin du dedans-dehors), à plat  (Une somme de souvenirs), dans la main (début du Maître d’école).

 

4 / Le découpage : si l’on est plusieurs à lire le texte, faire un découpage qui corresponde aux séquences narratives. Exemple joint : le découpage à deux voix proposé par deux voyageuses pour Le jardin du dedans-dehors.
5/ L’installation des voix associées : si l’auditoire est important, et pour qu’on les entende bien, installer les lecteurs associés plutôt de biais sur le côté que dans le public au premier rang.
6/ Préparation : si son public est hésitant par rapport à la lecture, donner d’une séance à l’autre une partie du texte à préparer. Exemples : les souvenirs de Monsieur Wilson dans Une somme de souvenirs/ Les textes des différents protagonistes dans la Princesse aux mille et une perles.

VML

A la résidence mutualiste du Parc à Genlis (21), après la lecture épicée avec les bibliothécaires d’Une somme de souvenirs, nous avons proposé aux auditrices d’illustrer les souvenirs de Monsieur Wilson. J’avais préparé des visuels leur correspondant : désert, guerre, soirée tango, fête foraine, remise des diplômes.
Chaque dame a découpé les éléments et fait sur une feuille de couleur une composition visuelle dotée de commentaires personnels. L’ensemble a été affiché dans le hall de la résidence.

Charlène, animatrice

Quand un album s’inscrit dans la Grande histoire, le remettre dans son contexte, c’est lui donner de l’amplitude. Nous en avons fait l’expérience à l’atelier « dégustalivres » de la maison des seniors  à Chalon/ Saône où nous présentions à deux voix la lecture épicée d’Un air de liberté à Congo Square.

Annie, professeur d’histoire-géographie* à la retraite, a fait un vivant exposé, cartes à l’appui, sur la traite négrière rappelant comment les esclaves étaient recrutés (captures de guerre,  enlèvements, achats, échanges) puis triés dans les colonies où le rapport maître-esclave était régi par le code noir. On s’y croyait presque !

La proposition de décompter avec le public les jours de la semaine jusqu’au dimanche festif a bien fonctionné nous amenant jusqu’à aujourd’hui avec les photos de la plaque commémorative et de la stèle près de laquelle on continue à danser et faire de la musique.

* Au collège ou lycée, c’est l’occasion ou jamais d’intégrer des collègues au projet et de leur faire découvrir que des textes illustrés valent des supports de cours !

Pour ceux qui les ont, pensez à proposer en livres cousins, à côté des romans jeunesse sur le sujet :
– deux albums de précédents voyages-lecture évoquant l’esclavage : Les Robinsons de l’ile Tromelin d’Alexandrine Civard-Racinais (Belin) et Catfish  de Maurice Pommier (Gallimard).
– deux romans adulte : Bakita de Véronique Olmi, sorti en poche en janvier 2019 et Underground Railways de Colson Whitehead (Albin Michel).
VML

D’Emmanuel Delorme, professeur de lettres – Chalon/ Saône

A mes élèves de 6e, j’ai fait une lecture partielle de Ruby tête haute me concentrant sur le récit personnel de ses premiers jours à l’école des blancs à l’aide également de photos d’archives. L’observation du tableau nous a permis de remarquer que la virulence des manifestants évoquée dans l’album se retrouvait aussi sur le tableau : la tomate éclatée, les inscriptions racistes…

Les élèves ont spontanément demandé s’il s’agissait d’un tableau célèbre et ont voulu savoir où on pouvait le voir. Si j’en avais eu le temps,  je leur aurais passé la vidéo où l’on voit le président Obama et Ruby adulte face au tableau  «The problem we all live with » de Norman Rockwell. Pour finir, je leur ai suggéré de lire l’album dans son intégralité.
Voila notre bilan de lecture.

Elle se prénomme Ruby.
Elle est née en Lousiane, aux Etats-Unis. Elle a grandi à La Nouvelle-Orléans. Elle est courageuse. Elle a la peau noire.

En 1960, elle a passé une année scolaire seule dans sa classe avec sa maîtresse, Barbara Henry, parce qu’elle était noire.

Nous nous prénommons Alexis, Amine, Asma, Aurélia, Axel, Chloé, Dalila, Elona, Hanaa, Hiranur, Iliana, Mariana, Médhi, Mélinda, Nathan, Noé, Noham, Norah, Rayana, Ruben, Salim, Yanis…
Nous sommes nés à Autun, Berlin, Chalon-sur-Saône, Champigny-sur-Marne, Santa Maria das Feira, Tirana…
Nos familles viennent de Montceau-les-Mines, de Reims, de Saint-Etienne, d’Albanie, d’Algérie, d’Allemagne, d’Angola, des Comores, du Portugal, du Maroc, de Mayotte, du Mexique, de Tchéchénie…
Nous sommes gentils, joyeux, rêveurs, ronchons, sociables, sportifs, timides, voire très timides… Nous pouvons aussi avoir un fort caractère !
Nous sommes beaux, belles, blancs, bruns, grands (un peu), métisses, minces, noirs, petits, de taille moyenne. Nous avons des cheveux longs, la peau blanche, mate, les yeux marron…

En 2019, nous ne nous ressemblons pas, nous sommes tous différents les uns des autres, mais nous sommes dans la même classe, le même collège, et c’est très bien comme ça !

En janvier, j’ai réalisé la scénographie devant 20 jeunes d’enseignement spécialisé. Jusqu’à la votation, on va se rencontrer tous les 15 jours, soit à la Médiathèque soit dans les salles de classes de Verdeil, pour partager un album.

L’hôte qui reçoit prépare une présentation d’un album de son choix. Mercredi passé, Corinne et sa classe ont mis en scène Le Labyrinthe de l’âme.

Un grand labyrinthe a été créé sur une table. Chacun notre tour, nous faisions avancer un petit personnage (fabriqué par José),  jusqu’à une image représentant un état d’âme. Arrivé à l’une de ces émotions, un élève lisait à haute voix un extrait du livre. La traversée du labyrinthe a duré environ une demi-heure. Ensuite, chaque élève a reçu la silhouette d’un visage, préparé par Lucas et Jasmin.

Avec peinture, feutres ou crayons, chacun devait figurer un état d’âme de son choix. Au bout d’une demi-heure, les différents portraits ont été réunis sur un tableau. Avec ces nouveaux dessins, on aurait pu réaliser un tome 2 du Labyrinthe de l’âme !


Sandra, bibliothécaire à Aigle (Suisse)

 

A Sens, ce premier semestre 2019, les ateliers de tricot urbain vont s’inspirer du Labyrinthe de l’âme en prêtant des émotions aux arbres du parc de la médiathèque. L’idée, soufflée par Christelle, bibliothécaire, a été adoptée par des groupes participant à 1, 2, 3 albums : IME, ESAT, pensions de famille, clubs du 3e âge.

Le service municipal des espaces verts a validé l’initiative et, pour permettre une harmonisation visuelle, a déjà annoncé les couleurs des massifs printaniers.
Un seul arbre ou plusieurs seront-ils habillés ?  Devinera-t-on aux formes, aux trames et aux couleurs leurs états d’âme ?
Ce sera la surprise qu’on découvrira le 16 mai 2019, le jour même de la rituelle rencontre entre voyageurs-lecteurs de tous âges, avec vote et partage de créations inspirées des albums.