Chaque automne, j’ai pris l’habitude de venir avec quelques résidents au lancement d’1.2.3 albums à la médiathèque départementale de l’Allier. Au foyer ensuite, nous vivons le voyage avec beaucoup d’intensité.

En novembre dernier, Philippe, l’un des résidents, confiait à Véronique sa passion pour l’écriture et la musique. Elle a rebondi en le défiant, lui et les voyageurs-lecteurs, de « slamer » 1.2.3 albums.

Nous nous sommes pris au jeu. Nous avons mis en mots tout ce que nous avait apporté ce beau projet au fil des saisons. Sur plusieurs séances, nous avons organisé le texte. Philippe et un musicien de son groupe ont conçu la mise en image du slam.

Nous sommes fiers du résultat et heureux de le partager.
Nous sommes tristes de savoir que l’aventure s’arrête avec Livralire. Mais nous allons, d’une manière ou d’une autre, continuer à lire, échanger et créer.

Catherine Charmant, éducatrice au foyer de vie d’Ebreuil (03)

Comme chaque mois de juin, les participants à 1.2.3 albums ont été invités à désigner leurs trois livres préférés : ceux qu’ils aimeraient offrir ou se faire offrir,  qui les ont marqués, qui leur ont appris quelque chose.
Merci aux voyageurs qui ont participé au vote !

Te souviens- tu Marianne se détache nettement suivi par La Robe de soie et La Boucle d’oreille rose.
Leina et le seigneur des amanites est ex aequo avec Le jardin de Baba.
Suivent Electrique et Tout ce que la guerre déteste.
En 8e position, Design Design.

Ces résultats ne disent rien de la richesse des échanges et des créations collectives, ni des découvertes individuelles. Ils soulignent la préférence pour les récits de vie et l’influence des lectures épicées qui nourrissent l’écoute, facilitent la compréhension, dynamisent l’histoire, relient les narrateurs aux auditeurs.

VML

A la résidence des 7 fontaines à Givry, le projet d’écriture inspiré de La robe de soie, annoncé sur ce blog en mars, a été mené au bout. La restitution a eu lieu le vendredi 7 juin pour le régal des nombreux invités car les textes étaient spécialement goûteux !
Chaque voyageuse a encadré la photo ou le dessin de son élément fétiche et partagé le ou les souvenirs correspondants. Exemples :

  • Les bougies de Michèle, qui lui rappellent celles du sapin de Noël de son enfance, celles des anniversaires, celles de la barque qui descendait le Gange.
  • Les jonquilles de Josette.
  • Le chat d’Eliane baptisé « Kapo » après son sauvetage sous un capot.
  • Le lapinou philosophique de Maryse.
  • Le baigneur de chiffon de Paulette démantibulé par sa sœur.
  • Le triton que Marie-Jo découvre dans sa cave et nourrit deux années de suite.
  • Le rugby qui donne la niaque à Nicolle comme aux jeunes supporters qui en oublient leur portable.
  • Les tulipes de Marie-Christine, qui lui rappellent celles du film Fanfan la tulipe sorti l’année de sa naissance, celles qu’elle dessinait petites, celles qu’elle portait crochetées en bandeau.
  • Le canal du centre -avant qu’il ne soit détourné vers Crissey- qu’Anne-Marie traversait à Chalon par quatre ponts entre Géant Casino et la Saône :  le pont de fer, le pont Garibaldi, le pont de la Colombière et le pont tournant, dit « pont des fainéants ».

Nonna, la vieille dame dans La robe de soie, aurait sûrement écouté ces évocations avec plaisir et même rallié ce groupe dont les confidences ont resserré les liens.

Marie-Christine Defaut et Véronique M Lombard

Au collège Saint Dominique à Chalon, on a embarqué les 130 élèves de 6e dans le voyage-lecture.  Le jour où, grâce au prélude, ils découvraient les albums, on leur a remis le carnet de voyage fourni par Livralire. Ils le remplissaient au fur et à mesure des dégustations de lectures épicées et des lectures individuelles.

Dans le cadre des heures d’accueil au CDI, je leur ai proposé d’évoquer leur album préféré sous la forme d’une couverture ou d’une carte postale ou d’une boite.Ils ont travaillé et créé sur la base de leurs notes et d’une fiche pédagogique avec exemples et consignes.

Les rendus les plus parlants ont été exposées au CDI pendant trois semaines.
Véronique Guyon, documentaliste.

1, 2, 3 albums est un voyage-lecture pas un concours de lecture.
C’est une aventure de lectures partagées, pas un championnat ni un défi.
Et pourtant on propose un scrutin.

 Voter est en effet un moyen de :
– clore l’aventure de lecture.
– dire quels sont les albums qu’on a préférés : les 3 titres qu’on aimerait offrir à quelqu’un ou se faire offrir.
– avoir une occasion d’initiation citoyenne.
– retrouver ceux avec qui on a partagé des moments de lectures et d’échanges notamment dans le cadre de jumelage.
– rencontrer d’autres personnes qui ont lu les mêmes textes. Exemple, à Sens (89) ou à Chagny (71) où tous les voyageurs se retrouvent à la médiathèque pour voter et partager une interprétation de lecture.

Livralire fournit (sur le drive) du matériel (modèle d’affiches, de bulletins, fiches de résultat) et un guide pour organiser au mieux  et à sa façon le vote individuel ou collectif. Exemples  :

– Une urne est à disposition des lecteurs pendant quinze jours.
– Des élèves volontaires organisent le vote sur une journée et accueillent les classes à tour de rôle  au CDI.
– Ici, le vote intergénérationnel se fait en deux temps. Jeunes et aînés, répartis en petits groupes ont discuté et fait un choix unique de trois albums préférés. Un délégué déposait ensuite le vote du groupe dans l’urne.
– Là, le vote réunit les élèves de CM, de 6e et les aînés de l’Ehpad. Le vote individuel a lieu dans chaque classe et à l’Ehpad. Lors de la dernière rencontre, les bulletins sont apportés, déposés dans l’urne et comptabilisés en public.

Les résultats doivent être transmis aux correspondantes BDP ou Livralire (selon les départements) au plus tard le mercredi 12 juin 2024.

 Les résultats seront proclamés sur ce blog le samedi 15 juin et par mail le lundi 17 juin.

VML

Depuis que le prélude a été joué par notre équipe, on partage régulièrement la lecture des albums au sein des sites de la Résidence Coeur du Brionnais à Semur et à Marcigny.

Deux fois par mois environ, je me rends aussi à l’école primaire Sainte Véraise avec deux résidents pour jouer une lecture épicée aux classes de CE et CM. Ce sont les anciens qui, après la présentation dans notre établissement, sélectionnent l’album qu’ils souhaitent partager. Nous sommes épatés par l’attention, la concentration et le silence qui règne dans la salle de classe lors de ces instants de lecture.

Te souviens-tu Marianne ? est tombé à pic : la ville de Marcigny se remettra aux couleurs de 1944 pour les 100 ans du débarquement en recréant l’ambiance et les décors de l’époque. Les associations diverses ont été sollicitées pour prendre part à ce projet. Nous montons une exposition à partir des questions des élèves et des réponses des résidents. Et nous espérons une interview des témoins de l’époque à Radio Cactus.

Electric fait beaucoup parler. Les ainés admirent l’humilité du grand inventeur qui n’a pas cherché à s’enrichir et qui était plus intéressé par les pigeons que par l’argent. Les jeunes connaissent le nom de Tesla par la voiture électrique. Chacun se demande comment on vivrait aujourd’hui sans l’électricité dont on est beaucoup plus dépendant qu’autrefois où on s’éclairait à la lampe à pétrole et aux bougies.

Grâce à La Robe de soie et aux nouvelles de Design Design lues en apéritif en fin de matinée, on discute de l’utilité des objets, de leur beauté mais aussi parfois de leur rareté ou de leur originalité. Un résident, véritable « Mac Gyver » de l’Ehpad, est à chaque fois heureux et fier de nous parler de ses inventions comme le bâton à pince permettant de ramasser des objets sans se baisser ou encore son distributeur de mouchoir fait maison !

Murielle Daumur, animatrice Ehpad Cœur du Brionnais  (71)

Eve Herbaut, enseignante à Darcey (Côte-d’Or), est accueillie avec sa classe de CM1-CM2 à la médiathèque Henri Vincenot à Venarey-les-Laumes où Lionel Gehant et son équipe leur jouent le prélude de présentation des albums.
Suit un premier feuilletage par petits groupes.
Ils rentrent à l’école avec les huit livres dans un sac.
La lecture individuelle commence.

Très vite Tout ce que la guerre déteste sort du lot.
La lecture collective est dynamique avec l’observation du rapport texte-image et des questionnements divers.
Elle est nourrie aussi par un extrait du film Le dictateur de Charlie Chaplin puis par les témoignages de deux nonagénaires qui avec émotion évoquent des souvenirs de leur vie entre 1940 et 1945 :

Pendant l’occupation les soldats allemands réquisitionnaient les chambres dans les plus belles maisons. Deux vieilles demoiselles qui venaient de Paris ont demandé à mes parents s’ils étaient d’accord pour que j’aille habiter chez elles pour éviter que les allemands ne viennent s’installer dans leur maison bourgeoise. Pour aller à l’école,  j’avais 4 km à pieds à faire et je n’avais que 5 ans. J’étais la reine, chouchoutée et bien nourrie.

J’avais commencé l’école avec un instituteur très sévère. Après avoir été mobilisé, il est revenu l’année de mon certificat d’études. J’appréhendais. A tort car la guerre l’avait changé. Il était beaucoup plus gentil !

Des dames se réunissent tous les mardis avec d’autres plus jeunes au foyer rural pour faire des jeux de société. Leur animatrice, comme l’enseignante, cherchait depuis un moment une occasion de faire se rencontrer leurs publics respectifs, d’âge différent mais du même village.
Un mardi après-midi, la lecture partagée de Tout ce que la guerre déteste les a donc réunis. Les élèves sont curieux, attentifs, émus. Les adultes en redemandent. Ils décident de mettre en scène l’album avec une touche d’humour et ensemble.

S’appuyant sur les propositions de ses élèves très investis, l’enseignante découpe l’album en plusieurs parties et répartit les rôles. Et le mardi, au foyer rural, les 10-11 ans créent les décors avec les 60-90 ans.

Les répétitions commencent. Les liens se resserrent. Puissent-ils se prolonger au-delà d’1.2.3 albums puisque les uns et les autres sont voisins !

VML  

Morgane Schäfer, enseignante spécialisée à l’école primaire et secondaire de Bussigny, grande voyageuse 1.2.3 albums, partage trois objets de contentement :

1/ Quel plaisir d’apprendre qu’il y aura un drive spécial archives ! L’autre jour, je me disais que c’était fort dommage que je n’aie pas gardé toutes les lectures épicées depuis toutes ces années !

2/ Dans le cadre de la lecture de Design Design, nous sommes allés voir les objets en vrais. En effet, ils sont exposés actuellement au MUDAC à Lausanne. Deux élèves ont été surpris, charmés et aussi déçus parfois par les objets. Mais c’était chouette de pouvoir sortir de l’école. Pour l’un deux, c’était une première, cette échappée culturelle !

3/ Deux élèves, qui ont vraiment de la difficulté en lecture, y trouvent du plaisir et ont même le courage d’aller faire des lectures dans d’autres classes.

La lecture épicée de Tout ce que la guerre déteste est quasi terminée.

Comme suggéré dans le conducteur de cette dernière, nous procédons à la collecte des verbes qui pourraient renseigner sur ce à quoi nous invite la vie puisque, bien entendu, ce que la guerre déteste le plus, c’est la vie dans toutes ses manifestations, sa variété.

Chacun inscrit donc, sur un quart de feuille de papier et à l’aide d’un crayon de couleur, le verbe de son choix. Victor répond à sa manière à la demande : pas de verbe, mais un dessin. Le groupe n’y perd pas au change, loin s’en faut puisque, en une image, nous récoltons plusieurs verbes : se balancer, jouer au
ballon puis s’asseoir à l’ombre d’un arbre généreux pour se reposer, piquer un petit roupillon.

La guerre doit en piétiner de rage, mordre son chapeau ! Et nous d’en rire, contents, grâce à notre camarade, de lui avoir joué un si mauvais tour, de lui adresser ce pied-de-nez !

Emmanuel Delorme, professeur de lettres (Camille Chevalier / Chalon-sur-Saône)