Je n’hésite plus à m’investir en tant que professeur de Lettres dans le projet 1, 2, 3 albums.

D’abord, et comme je l’ai déjà précisé dans un précédent article, il est aisé d’établir des liens entre le contenu des albums et les quatre thématiques au programme des lectures au collège.

Ensuite, les lectures épicées, fournies chaque année par Livralire, mêlant illustrations empruntées aux albums, textes habilement abrégés ou recomposés et lecture à voix haute, constituent un soutien à l’apprentissage de la lecture tel que nous le conduisons en classe. Par ce biais, les élèves, quelles que soient leurs difficultés, se trouvent bel et bien en situation d’exercer leur compréhension, comme Véronique et nos partenaires de la maison des seniors à Chalon-sur-Saône ont pu s’en rendre compte l’année passée.

Ces lectures épicées ont également l’avantage de pouvoir être conduites de manière aussi informelle que peu coûteuse en temps, une préoccupation constante chez tout professeur. Informelles parce que les échanges qui les prolongent sont essentiellement conduits à l’oral, permettant ainsi des prises de parole spontanées, développant et affinant les interprétations. Peu coûteuses en temps, parce que le temps d’une lecture correspond à celui d’une séance.

Enfin, ces mêmes lectures épicées fonctionnent comme des relais, des repères : elles permettent de mettre en mémoire des récits, des situations, des personnages qui annoncent ou rappellent celles et ceux à découvrir ou à retrouver dans les lectures au programme. Au cours d’une année scolaire, elles contribuent donc à élaborer et/ou consolider un réseau toujours plus serré de connaissances indispensables aux lecteurs en devenir que sont nos élèves.

Emmanuel Delorme, professeur de lettres à Chalon /Saône (Collège Camille Chevalier) et formateur en Bourgogne.

La sélection du 14e voyage-lecture intergénérationnel 2019-2020 (visuels des albums ci-contre) est présentée sur le site Livralire.

Ce pack de 8 titres parus en 2018 et 2019, d’une valeur de 125,85 € (prix public sans remise collectivité), a été constitué par un comité de professionnels attentifs et exigeants.

COURGEON Rémi : Tiens-toi droite ( Milan)
DEDIEU alias Kuro Jiki : La femme du potier (HongFei)
FERRIER Paule : La princesse au don perdu (De la Martinière)
MAROIS André : Moi, c’est Tantale (Isatis)
MIM : Philémon et Baucis (Didier jeunesse)
SCARPELLI Giacomo : Le voyage de Darwin (Sarbacane)
SEONNET Michel : Un jour particulier (L’Elan vert, le pont des arts)
TORTOLINI Luca : L’inventaire des jours (Passepartout)

Proposer leur lecture aux publics les plus variés, permettra à ceux-ci de :
– voyager en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud jusqu’aux îles Galapagos
– aller à l’usine, sur un bateau, dans un palais, une masure en montagne, au bord d’un puits, chez un potier
– rencontrer des enfants, des couples, des familles
– croiser des gens généreux, courageux, curieux, confiants, mais aussi des personnes épuisées, colériques, roublardes…
– aborder le thème du travail : celui des paysannes françaises au 19 siècle, celui des enfants du 21e siècle, employés encore aujourd’hui dans des mines et des usines
– cerner une démarche scientifique
– évoquer la question du sexisme
– dénombrer les dons de chacun
– faire l’inventaire de leurs journées agréables, mémorables, surprenantes, détestables…

VML

Le blog du 13e voyage-lecture intergénérationnel est clos.

Le 14e s’ouvre.

De janvier à juin 2019, 380 établissements scolaires, culturels, sociaux, médicaux, ont embarqué leurs publics dans le 13e 1, 2, 3 albums, certains avec 10 personnes, d’autres avec 450 (dans des collèges notamment).

On sait que la très grande majorité des voyageurs est prête à réembarquer. Grand merci aux animatrices (et animateurs) du voyage-lecture, professionnels ou bénévoles, qui ont  partagé sur ce blog des étapes et des ressentis et à celles qui ont pris le temps de faire un bilan écrit et de partager :

Les bénéfices
– La sélection intéressante et riche nourrit individuellement, questionne collectivement et donne des pistes d’échanges et de créations. Les albums sont des perles.
– Le support album fait mouche. Les a priori tombent d’eux-mêmes, les histoires sont touchantes et sans mièvrerie. Les illustrations variées et belles.
– La boîte à outils fournie par Livralire est conséquente, modulable, utilisable dans des contextes différents par les organisateurs du voyage et par les lecteurs eux-mêmes.
– Le canevas du projet constitue une méthodologie novatrice et singulière pour aborder la lecture et permet aux bibliothèques d’être au plus près des habitants.
– L’effet de communauté se crée autour des albums. Ce sentiment d’appartenance est très important aussi bien chez les personnes âgées souvent seules et chez des enfants qui cherchent l’intégration sociale.
– L’impact lecture est réel et mesurable même chez les plus réfractaires ou les plus fragiles.
– Les rencontres humaines sont vivifiantes parfois surprenantes et inattendues entre des élèves et des pensionnaires de l’Ephad.
– Le travail en équipe allège, donne une place à chacun et enrichit.
– Une place active est donnée aux voyageurs-lecteurs.

Des conseils
– Venir à la présentation de la scénographie et du projet.
– Oser se lancer en s’entourant de collègues ou de partenaires expérimentés.
– Savoir à l’avance avec qui on va voyager.
– Acheter les albums dès que possible à la rentrée pour que les collègues s’emparent des œuvres et établissent des ponts avec leur programme.
– Préparer son agenda pour ne pas se laisser déborder et pouvoir terminer dans les temps et dans de bonnes conditions.
– Travailler en collaboration avec souplesse.
– Ne pas vouloir en faire trop surtout si c’est son premier voyage.
– Accueillir ce qui se passe, ce qui se dit, après une lecture épicée.

Des difficultés
– Le manque de livres.
– Le manque de temps pour s’investir plus avant, notamment dans les lectures épicées.
– Le peu d’échos dans le corps enseignant dont l’accompagnement pédagogique serait pourtant nécessaire chez les plus jeunes.
– La volatilité du public adulte pourtant séduit par la scénographie mais peu enclin à emprunter les albums.
– L’investissement aléatoire des enseignants et des jeunes.
Le niveau de lecture.

Des impressions
En tant qu’organisateurs
– Nous prenons avec les apprenants langue étrangère un immense plaisir à dialoguer autour des albums, chacun offrant des thèmes différents et des pistes d’échanges.
– Je suis surprise à la bibliothèque de voir de nouveaux lecteurs s’intéresser à 1, 2, 3 albums et ravie de voir des personnes qui avaient assisté l’an dernier à la scénographie mais qui n’avaient pu venir cette année, lire volontiers la nouvelle sélection.
– Le vote responsabilise le lecteur qui se sent impliqué et prend plaisir à donner son avis.
– Après la scénographie, j’ai laissé l’enseignante voyager comme elle l’entendait.  Elle s’est contentée de veiller à la bonne circulation des livres dans les familles (bonus). Dommage qu’elle n’ait pas pour certains titres au moins utilisé les lectures épicées ou fait des lectures collectives. Ca aurait rendu certains textes plus accessibles.
– En conseil de classe, une maman m’a remerciée de proposer en tant que professeur de lettres des lectures originales aux élèves avec le projet 1, 2, 3 albums.

En tant que lecteurs
de 6e 
: Grâce au projet 1, 2, 3 albums j’ai appris … qu’il fallait se battre et ne pas laisser tomber / un peu plus ce que c’est que le racisme / que ce n’était pas pareil dans tous les pays / à aimer la lecture et me suis mise aux mangas.
Dans le projet 1, 2, 3 albums j’ai aimé lire des livres différents / les lectures épicées / avoir des livres sympas et rapides à lire / faire le carnet de lecteur / aller présenter à d’autres.

jeunes primo-arrivants : Chaque lundi on partageait un album. J’ai aimé quand j’avais un rôle. / A la fin de l’histoire qu’on avait lue, on discutait, on donnait notre opinion, on notait des mots nouveaux, on faisait un résumé. J’ai beaucoup aimé ces moments-là.

adultes en réinsertion : Beaux sujets, belles illustrations, quel beau voyage ! / Certaines histoires nous donnent une belle leçon de vie/ Je n’avais jamais entendu des histoires comme ça, c’est bien ! J’ai aimé ça ! / C’était ma première participation. J’ai trouvé cela très intéressant. Je reviendrai.

seniors : C’est vivifiant de voir des enfants / On apprend encore plein de choses avec les albums / J’aurai jamais pensé jouer une histoire à mon âge devant un public attentif.

VML

Au vide-grenier de sa petite rue, Monsieur Wilson a vendu avec succès une somme de souvenirs. Il n’a plus rien pour évoquer sa femme et parler à sa petite-fille de sa grand-mère qu’elle n’a pas connue, sauf peut-être une robe …

À l’heure du jetable, du snapchat fugace, du fast food et de la disparition progressive des discussions intergénérationnelles, j’ai voulu montrer à mes élèves de 6e 1 et 6e 2 que les objets sont porteurs de souvenirs, et que les souvenirs, cela aide à vivre, à échanger… Les souvenirs se conservent, s’entretiennent, se racontent et créent du lien.

Ainsi, chaque élève est allé interroger un membre de son entourage, lui a demandé de choisir un objet auquel il tenait et pourquoi il voulait le transmettre. Nous avons alors fabriqué notre album… en souvenir de cette année passée ensemble.

Un grand merci à Michèle Aluze-Bourgeois, responsable du secteur jeunesse de la bibliothèque d’Autun, qui nous a soufflé l’idée de la collecte d’objets-souvenir, inspirée sans doute par l’album La vie des gens (1, 2, 3, albums 8) et à Paul Andali pour la conception graphique du livret avec 41 témoignages dont 5 sont partagés ci-dessous. (Cliquez au centre pour mettre en pleine page et lire les textes)
Julie ANDALI, professeur de lettres, collège la Châtaigneraie, Autun (71)

Pour nous au collège Lazare Carnot à Nolay (21), 1, 2, 3 albums fut une très belle aventure, avec à chaque temps différent une intensité certaine.
Le temps de la lecture des livres par un groupe de 8 élèves de 3ème volontaires.
Le temps du partage de ce petit groupe autour des livres.
Le temps de la réappropriation de la scénographie.
Le temps de la restitution devant chaque niveau.
Le temps de lecture à haute voix de ces jeunes volontaires aux plus jeunes du collège.
Le temps de débats soulevés après la présentation aux plus grands.
Le temps de lectures libres pour tous les élèves du collège : kiosque 1, 2, 3 albums mis à disposition dans un couloir, emprunt basé sur la confiance et vote libre.
Le temps du choix individuel pour ses trois albums préférés.
Le temps des résultats du vote.
Le temps des vacances avec la promesse d’un nouvel embarquement.

Anne Guillemaux, professeure documentaliste.

La sélection pour la prochaine saison d’1, 2, 3 albums est disponible sur demande à asso [at]livralire.org avant d’être présentée en détail en septembre.

On doit avouer que le choix a été rapide à faire.

Le nombre d’albums parus entre septembre 2018 et juin 2019 répondant aux critères n’a jamais été aussi bas : dix-huit titres contre une trentaine les premières années. Le suivi de la production se fait toujours au plus près des parutions avec la librairie La Mandragore  (Chalon-sur Saône) et les services de presse des éditeurs. Mais le nombre de nouveautés d’albums « grand large » diminue et la qualité laisse souvent à désirer.

Le comité a sélectionné quatre titres à l’unanimité. Pour les autres, la discussion s’est engagée sur les qualités littéraires et graphiques autant que sur les ouvertures pédagogiques et culturelles possibles.

La liste finale se doit d’être la plus diversifiée et riche possible avec des histoires vraies (les préférées des lecteurs), au moins un conte et un album catalogue à imiter ou à compléter. Par chance, un de ce type, publié par un petit éditeur, s’est  présenté à nous fin mai.

La sélection 2019-2020, à l’accent féministe, s’avère pleine de promesses et nous espérons que les animateurs d’1, 2, 3 albums s’en empareront, l’esprit ouvert et créatif, comme nous avons commencé à le faire pour préparer un kit d’animation de qualité.

Véronique M Lombard et les membres du comité : Martine, Emmanuel, Véronique, Marie-Christine, Marie-France, Catherine, Annie.

Au collège de Matour (71), 22 élèves de 6e sur les 59 embarqués dans 1, 2, 3 albums se sont portés volontaires pour aller lire un album à leurs anciens camarades d’école primaire et pour certains à un frère ou une sœur.

Les 6 lectures se sont déroulées dans cinq classes primaires de Matour, Montmelard, Tramayes et Brandon.

Elles ont été précédées d’une mise en place pour donner le contexte – un puzzle pour Ruby tête haute, un pictionnary pour Mille dessins dans un encrier – ou suivies d’un quizz sur les façons d’être princesse pour La princesse aux mille et une perles.

Ces ateliers-lecture très conviviaux contribuent à la liaison CM2 – collège tant au niveau des élèves que des enseignants. Les enfants de primaire qui avaient visité le collège la semaine précédente en ont profité pour interroger les collégiens.
RDV est pris pour l’an prochain.

Estelle ROMANO, professeur documentaliste au collège de Matour (71)

Au Chesnay (78), des élèves du collège Blanche de Castille ont fait du Labyrinthe de l’âme leur livre phare, offrant aux ainés d’un Ephad partenaire des célèbres chansons françaises sur diverses émotions.

A Bligny-sur-Ouche (21), des élèves de 5e, répartis par groupes de 3, ont réfléchi à la manière de représenter une émotion de leur choix, de manière non figurative en privilégiant l’expression par les formes, les couleurs et les matières.

Solitude

Joie

Ennui


A Givry (71)
, lors de la dernière rencontre intergénérationnelle autour du vote au foyer-logement des Sept Fontaines, les élèves de CM2 de l’école Lucie Aubrac ont, par petits groupes, mis en scène des sentiments et des émotions (à découvrir en cliquant sur l’image).

Si seulement ces interprétations avaient été partagées avec des résidents d’un Ehpad bourguignon, embarqués dans 1, 2, 3 albums qui en ont été privés parce que l’album était jugé trop lourd et trop difficile… leurs langues se seraient déliées autant que pour le Maitre d’école ou Une somme de souvenirs.

VML

Dans les années 1950, dans les villages reculés italiens, l’électricité était encore un rêve. Qui dit que Don Lorenzo avait pu l’installer dans son école à Barbiana ? Sans doute les enfants lisaient-ils à la bougie ou à la lampe à pétrole.

Pour mettre leur public adulte dans l’ambiance de l’époque et du cadre, Mado et Yasmine, organisatrice d’1, 2, 3 albums au centre social d’Ambérieu (01) ont fait la lecture du Maître d’école dans leur espace habituel, agencé pour l’occasion en salle de classe éclairée aux bougies. Nul ne s’étonnera que la discussion ait porté sur la fée électricité et sur l’affirmation formulée à la fin de l’album : « la lumière, c’est mieux que l’obscurité ».